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          La tolérance est communément définie aujourd'hui comme étant la capacité d'un individu à accepter une chose avec laquelle il n'est pas d'accord. Ce sens est acquis grâce au développement de valeurs et de normes morales multiples (l'autorité d'une vie peut ainsi avoir plusieurs sources reconnues comme valides : la raison, Dieu, la nature, etc.).


          Mais
au temps de la Réforme, nous découvrons que la définition de la tolérance n'était pas aussi « libérale » que la nôtre, et qu'elle n'allait pas de soi. Par exemple, Castellion, un ex-ami de Calvin, avec qui nous partagerions aujourd'hui volontiers sa conception de la tolérance, était une exception en son genre. Après la condamnation à mort de M. Servet à Genève, il écrivait cette formule célèbre : « Tuer un homme ce n’est pas défendre une doctrine, c’est tuer un homme. Quand les Genevois ont fait périr Servet, ils ne défendaient pas une doctrine, ils tuaient un être humain : on ne prouve pas sa foi en brûlant un homme mais en se faisant brûler pour elle ».


          Or, comme certains de ses contemporains, Calvin était loin d'être un modéré. Pour lui, la « vérité chrétienne » était une chose entière, sans compromissions possibles. Ainsi, la liberté religieuse, au sens de la coexistence entre des confessions et des religions différentes, était impossible pour lui. A titre d'exemple, nous pouvons évoquer le cas Michel Servet, mis à mort pour hérésie, à cause de son reniement des dogmes de la Trinité et de la divinité du Christ.


          Cependant, la pensée de Calvin contenait bien des germes d'une conception de la tolérance. L'un d'entre-eux peut être découvert dans le chap.19 du livre III de l'institution de la Religion Chrétienne (édition de 1561), intitulé « la liberté religieuse ». La notion que nous allons présenter ici est celle de la « liberté de conscience ». Faisons deux remarques :


  •           Il ne faudrait pas comprendre cette liberté comme une individualisation de la conscience. Celle-ci est soumise à l'opération intérieure du Saint Esprit, véritable Autre de la conscience, qui se dédouble en une relation entre Dieu et nous. Le premier fruit de cette liberté de conscience, c'est la relativisation des oeuvres. Mais ce n'est pas une relativisation totale : il y a un absolu, Dieu.


  •           Ensuite, le contexte de notre chapitre est le suivant. Lorsque Dieu nous a donné la grâce, le pardon de tout ce qui pèse sur la personne humaine, celle-ci doit exprimer extérieurement le don qu'elle a reçu. Ainsi, la liberté de conscience ne peut commencer et s'achever en un face à face ininterrompu entre Dieu et nous-mêmes. La grâce ne se réduit pas à un rapport subjectivité (la conscience) – objectivité (Dieu). La conscience doit remercier Dieu, par des actions de grâce et en se sanctifiant avec un comportement conforme au don reçu. Ce point pose la question suivante : comment vivre collectivement cette grâce ? Or, en vertu de cette liberté de conscience qui ne porte pas d'autre absolu que Dieu, nous ne pouvons pas imposer aux autres notre propre conception de la liberté par rapport aux choses dites « indifférentes » à la conscience. Le seul critère est l'édification mutuelle.


          Or, comment pourrions-nous intégrer aujourd'hui cette « liberté de conscience » au milieu de nos vies ?

  • D'abord, elle pourrait se constituer comme nerf critique de toute autorité qui se pose de manière absolue. A condition de remarquer une limite à l'usage de la liberté de conscience, qui est de taille : le risque de la monopolisation de la « vérité chrétienne » dans le champ de la réalité. Il faudrait en effet que s'affirment une pluralité d'autres configurations éthiques, avec pour chacune d'entre-elles, des valeurs de références différences, afin d'éviter d'être enfermés dans une idéologie.


  •           La liberté de conscience est aussi un principe éthique, qui pose la question de ce qui est important : est-ce faire et imposer ma « loi » qui se présente comme une liberté, qui s'affirme contre d'autres libertés, ou bien construire une éthique du comportement dont le critère serait de faire progresser chacun (à condition que ce ne soit pas dans la même direction … un autre versant de la monopolisation de la « vérité chrétienne » … mais anticipée par Calvin par la notion de liberté de conscience qui préfigure l'autonomie au sens kantien : devenir des êtres véritablement majeurs, capables d'avoir une opinion propre qui aurait interrogé sa validité).

  • Ensuite, la « liberté de conscience » pose la question de la relation de l'individu à autrui. La présence d'un Autre dans la conscience fonde la liberté individuelle, mais en même temps, sur la base de la dialectique grâce/gratitude, nous sommes projetés dans un horizon habité par autrui.


  •           Enfin, nous pouvons bénéficier d'un rapport neuf à la création. Nous sommes invités à ne pas nous contenter d'un usage unique, isolé, utilitaire des choses du monde. En effet, la liberté de conscience va de paire avec la référence à Dieu. Cela implique de ne pas sombrer dans l'idolâtrie, dans la jouissance de la chose pour elle-même, mais de la ramener à son origine, et ainsi permet de relativiser, de désacraliser ces choses-là, de laisser de la place pour autre chose.

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Proposition

          De la folie d'amour, qu'est-ce qu'on a fait ? Cette fadeur qui nous étouffe et qui nous tue. Il faut que cela cesse. Il nous faut vivre éternellement la grâce et ne plus avoir peur. Toujours être pour l'autre ce que l'on est vraiment. Ne pas dire non, jamais. Et puis s'abandonner, brûler de tous les feux ; à en mourir. Et en mourir. De l'énergie qui en découle créer le beau. Sans concession, s'abandonner à l'autre. Émouvoir la nature au point de la faire suffoquer peut-être.
          Car enfin, pourquoi donc on s'obstine à dire que l'on ne s'aime pas ? C'est quoi ce besoin de pleurer seul, cette peur ? C'est le mystère.
          On meurt des temps figés, des questions inutiles, des engagements faciles. Mais rien n'empêchera jamais les méchants d'être méchants, la bête immonde d’être à certains vitale, le malsain d'être immuable. L'arme absolue ne combat plus que l'innocence et, pacifiés, nous sommes l'agneau face au couteau.
          C'est la mélancolie qui nous sauvera, un jour, tout à la fin, de tout ce miasme incohérent et sans visage, de cette horreur qui fait pleurer, de cette souffrance. C'est de cette paix qu'il nous faut, le coeur attendri de soi-même et des autres, de cet appel où tout s'effondre pour renaître.

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